Des centaines, des milliers, des millions ?
Lutter contre les violences faites aux femmes, c'est lutter pour détruire le système qui organise la spoliation des femmes de toutes leurs ressources matérielles, affectives et spirituelles.
Pour une femme qui succombe à ses blessures, combien de blessées, de handicapées, de traumatisées, de malades chroniques ? Des centaines, des milliers, des millions ?
Pour une femme qui a le courage immense de porter plainte contre son agresseur, combien de menacées, injuriées, dénigrées, découragées, par la famille, les amis, les collègues, les policiers, les juges ?
Ici, en France, au 21ème siècle, dans un des pays les plus riches de la Terre, dans le pays le plus fier de ses lumières politiques, des femmes doivent subir un rapport prostitutionnel avec un ou plusieurs hommes pour assurer leur subsistance.
Le rapport prostitutionnel impose aux femmes de considérer le renoncement à l'inviolabilité de leur personne comme un moyen d'échange, pour avoir de l'argent, des vêtements, un toit ou de la nourriture. Il s'appuie sur cette idée encore très répandue que quand une femme n'a rien, il lui reste toujours sa sexualité à monnayer.
Le rapport prostitutionnel est une survivance esclavagiste, pratique savamment théorisée en son temps en France, seul pays au monde à avoir codifié dans le «Code Noir » le bon usage des esclaves définis alors comme « biens meubles ». Combien de femmes se sentent des biens meubles dans l'esprit d'un homme ? Des centaines, des milliers, des millions ?
La pensée esclavagiste et son imaginaire, recyclés dans le colonialisme puis le capitalisme mondialisé, ainsi que la récupération d'une « libération » sexuelle sans égalité ont débouché sur toutes le formes « modernes » et déculpabilisées d'exploitation sexuelle : industrie du SM, de la pornographie, tourisme sexuel, etc...
Le rapport prostitutionnel ne s'impose pas seulement aux femmes prostituées. Combien de femmes rendues dépendantes des hommes par les structures sociales sont aux prises quotidiennes avec ces transactions sordides : du « sexe » pour avoir ou garder son travail, pour avoir ou garder son droit au séjour, parfois juste pour avoir le droit de dormir. Des centaines, des milliers, des millions ?