La manifestation contre la réforme des retraites fut une belle réussite : 30 000 personnes dans les rues du Mans, c'est rare pour être souligné. Et cette fois-ci, les syndicats n'étaient pas les seuls même s'ils n'y sont pas pour grand chose : de très nombreux travailleurs ont montré leur détermination à refuser une réforme injuste et dangereuse pour leur avenir.
Mais, une nouvelle fois, la question se pose : que vont faire les syndicats de ce gros potentiel d'affrontement ? qu'ils le nient ou non, ce sont bien eux qui ont les cartes en main, eux qui ont le pouvoir de déposer des préavis et préparer des actions plus dures. Accuser les gens de ne rien vouloir faire, c'est un peu facile quand on empêche toute initiative un peu trop remuante.
Pour secouer la torpeur syndicale, il faudrait des organisations déterminées à agir contre le gouvernement. Or, les grosses centrales sont paralysées par leur prétention à rassembler toutes les tendances, toutes les sensibilités, à faire du nombre grâce à "l'apolitisme". A ce petit jeu de recherche de synthèse, ce sont toujours les plus modérés et les positions les plus réformistes qui s'imposent car ce sont les plus nombreux. Dans ces conditions, il est totalement vain et illusoire d'espérer muter de telles organisations en des syndicats de transformation sociale. Bien au contraire, c'est le "dialogue social" qui y domine comme stratégie.
Ras-le-bol du “dialogue social” des syndicats “responsables”
Aujourd’hui, il y a deux types de syndicalisme : celui, dominant et médiatique des grosses confédérations, et celui, ignoré et rejeté par la pensée unique pro-capitaliste, proné et pratiqué également par beaucoup de militants minoritaires dans les syndicats.
Le syndicalisme dominant est celui qui nous balade depuis des mois dans la rue au rythme de journées d’action, de “temps forts” qui ne débouchent sur rien de concrêt pour les gens. Derrière ces pratiques qui désespèrent ou exaspèrent de plus en plus, il y a une conception très consensuelle de la négociation avec patronat et Etat : celle du “dialogue social”.
Le dialogue social, qu’est-ce que c’est ?
Tout d’abord, ces syndicats donnent un rôle indispensable et respectable aux chefs, patrons et actionnaires qu’il n’est pas question de soumettre mais d’amadouer pour former une “communauté d’intérêt” équilibrée.
L’idée inavouée est que « Le Capital-Travail et le Capital-Argent sont les deux facteurs indispensables à la vie sociale. L'un complète l'autre ; les deux se font vivre mutuellement. Le devoir de ces deux collaborateurs est donc de rechercher, amiablement, de bonne foi et en toutes circonstances, le point de rencontre des concessions réciproques qu'ils se doivent l'un à l'autre. »
Pour ceux-là, un bon accord est un compromis qui se construit donc en dehors des conflits, dans des instances extérieures composées d’experts permanents, et qui doit aboutir directement à une relation “gagnant-gagnant” dans laquelle s’échangent discrètement nos victoires sociales antérieures contres quelques “aménagements” des mesures regressives envisagées par l’Etat ou les patrons.
Le syndicalisme de transformation sociale : la bonne méthode
A l’inverse, le syndicalisme révolutionnaire est hostile aux capitalistes et affirme que nous pouvons nous passer de nos dirigeants et des propriétaires des moyens de production grâce à l’autogestion. Il s’agit donc, pas à pas, d’obtenir le plus possible d’expropriations, de reprise des entreprises, d’accaparement des richesses et de disparitions des hiérarchies au profit des salarié(e)s.
L’outil de travail et les fruits du travail doivent revenir aux travailleurs(ses) par la lutte sociale.
Dans cette voie, la négociation est l’ultime étape de l’action syndicale. Car une bonne négociation doit être offensive en se basant sur un rapport de force préalable et tangible. Les seuls accords acceptables sont ceux qui ne satisfont sans concessions qu’un seul bord : le notre.
C’est justement le caractère contraint et forcé pour nos adversaires qui nous informe que nous agissons efficacement contre ce système. Vaincre totalement est le seul horizon.
Aussi est-il très important de frapper fort là où ça fait mal pour le patronat et son allié l’Etat. Il faut agir contre les intérêts économiques par la grève, le boycott, le sabotage, le blocage dans les zones de création de valeurs ajoutées ou les lieux d’encaissement des recettes.
Il n’y a pas d’autres moyens, il n’y en a jamais eu d’autres : faire perdre de l’argent aux capitalistes.